mercredi 4 décembre 2013

LES INSOUMISES

 
Un mercredi soir, enfant couché, mari en virée foot, je décide d’allumer la TV alors qu’aucune diffusion d’une de mes séries TV de prédilection n’est prévue. Je m’attends donc au pire…C’était sans compter sur l’une des rares « bonnes » surprises télévisuelles, réservée ce soir-là par Canal+ puisque je découvre avec émotion un reportage intitulé « Les Insoumises ». Ce reportage s’intéresse aux violences faites aux femmes partout dans le monde. Un tour du monde des mauvais traitements infligés aux femmes mais sans la vision aguicheuse d’un Zone Interdite qui feint de s’apitoyer sur le sort des prostituées alors que manifestement le caméraman ne parvient pas à détourner son objectif avide de l’arrière train de la victime ou  offre comme seul signe de compassion à sa misère un acquiescement répété en direction de son décolleté.

En bref, un vrai reportage qui laisse la parole aux victimes et limite les incursions narratives à la présentation des faits. On y découvre le visage de 5 femmes dont :

-          Au Mali, une femme qui se déplace de village en village pour faire reculer l’excision et surtout faire accepter l’abandon de cette pratique traditionnelle.

-          ou encore en France, des femmes qui retrouvent leur liberté et apprennent à retrouver confiance après avoir connu des violences conjugales aggravées par l’immobilisme des institutions publiques chargées de défendre leurs droits.

Plus que les faits, dont l’horreur ferait certainement l’unanimité, ce qui a attiré mon attention dans ce reportage est l’approche moins consensuelle et racoleuse du féminisme, le principe d’universalité souvent renié par les sociétés occidentales et l’absence de parti pris évitant un clivage Homme/Femme loin des réalités.

Des femmes combatives

On y découvre, des femmes qui luttent pour la reconnaissance de leurs droits en tant que personne. Le caractère combatif supplante le statut de victime. Un combat certes mais un combat fait de petites victoires, un combat qui s’insinue pour user non pas les hommes mais les idées. Un combat à l’opposé des putschs de communication des Pussy Riots.

La violence pour tous

On y remarque que la violence est présente mais surtout choquante partout même si elle revêt des formes différentes pour être acceptée par la société qui la laisse s’installer. Il n’est pas rare d’entendre les occidentaux s’offusquer des pratiques « barbares » de ces « autres » pays qui laissent des petites filles être mutilées par l’excision ou des femmes être chassées car elles ont été victimes de viol. Evidemment que ces pratiques sont condamnables et qui pourrait laisser dire que rien ne doit être fait pour les combattre ? Cependant, y a-t-il des civilisés et des barbares ? Des bons et des méchants ?

Qu’y a-t-il de plus aberrant entre

une communauté villageoise qui peine à abandonner une pratique séculaire, communauté qui a peu accès à l’éducation mais surtout à l’information, une communauté au sein de laquelle sortir du rang c’est aussi s’exclure alors que l’entraide est un des moyens de survie.

et une société citadine qui brandit les droits de l’homme (et de la femme) comme étendard, qui dit condamner les inégalités, protéger ces citoyens et qui pourtant « incite » les femmes à déposer une main courante soit une simple consignation des faits réduisant a minima la possibilité de voir le bourreau condamné pour ses actes. Par conséquent, une société qui laisse encore des femmes mourir sous les coups.

Les donneurs de leçons auraient peut-être tout à apprendre de Kadidia qui pour lutter contre l’excision évite la confrontation avec les chefs de village et préfère la discussion, la négociation, la sensibilisation et la persuasion lente.

Un combat de société et non un combat contre les hommes

Enfin, l’homme ne cristallise pas tous les maux et c’est bien la société dans son entier qui est ici incriminée. Les violences faites aux femmes ne sont pas réduites à un combat des femmes contre les hommes. L’approche, beaucoup moins manichéenne du reportage, met en exergue la responsabilité d’une société qui condamne une partie de celles qui la constitue au profit de l’argent, du poids des traditions, des préjugés ancestraux comme l’illustrent le cas de Khun Nee, thaïlandaise contrainte à la prostitution par sa propre amie d’enfance ou encore celui de cette turque qui, les yeux plein de larmes, concède que le plus douloureux ne fut pas le viol incestueux subi mais le rejet de sa mère après ce traumatisme.

Merci les Insoumises !

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