La Stupéfaction, car quelle autre première sensation peut saisir
l’Homme rattrapé par l’horreur dans son quotidien ? Celui qui, même
ébranlé par les évènements du 7 janvier dernier, conserve l’espoir de n’avoir
connu qu’une période voire un épisode malheureux. La réalité peine d’abord à
inscrire sa vérité tant l’horreur perturbe l’entendement, l’acceptation d’un
théâtre qui nous est étranger et consciemment ou inconsciemment, associé à
d’autres contrées…lointaines, « différentes ».
La Tristesse succède à l’aveu de réalité. La compassion,
décuplée par la proximité et les pensées d’assimilation qu’elle nourrit,
submerge et grise chaque constituant de nos êtres. On reprend conscience de
notre existence dans un ensemble souvent accusé d’être anonyme. On tente
d’approcher, sans pouvoir y parvenir, la douleur des proches endeuillés. On
console, réconforte, soutient car aider celui qui subit redevient un réflexe,
un instinct.
La Peur, tant décriée, chassée, balayée dans les slogans qui
inondent notre virtualité intégrée, s’inscrit en toile de fond. Reniée comme un
marqueur de faiblesse, on chante qu’elle n’a pas le droit de cité. Pourtant,
comment pourrait-elle ne pas être ? L’important n’est pas tant sa présence
mais ce qu’elle suscite car l’Homme n’est-il pas fait pour vaincre ses peurs,
les décrypter, y insinuer la raison et le recul qui en découle. La peur comme
antichambre des éléments pris dans un cercle vertueux qui contribuera à la
déconstruire.
L’Indignation, face à des comportements dénués d’humanité, déraisonnés
qui se produisent chaque jour, partout dans le monde et s’imposent lorsqu’ils
se rapprochent. L’indignation, propulsée par un sentiment d’injustice face à
ces vies ôtées pour l’exemple, par intérêts politiques obscurs et
nécessairement étrangers aux victimes, des disparus potentiels défenseurs des
libertés, de la paix, de la pluralité. L’indignation face à l’atrocité imposée
aux Hommes par ses pairs. Agacée par toutes les récupérations politiques qui
foulent le sang encore chaud du pavé pour reprocher, repérer les signes qui
pourront être mis à profit demain, plus tard. Des responsables politiques qui détournent,
capitalisent, reproduisent les erreurs en réagissant à chaud sur une forme
informe sans attaquer les origines, sans sécuriser le fond.
La Réflexion en réaction à la passion, car elle se doit de penser
l’avenir sous de meilleurs auspices. Une réflexion qui pousse à s’interroger
sur notre place dans ce débat, qui annihile les emportements, qui pousse à la
solidarité pour ne pas satisfaire les envies des « deshumanisés », qui
pousse à faire preuve de compassion à l’égard des Musulmans qui comme chacun
subissent ces actes atroces, à la différence près que ceux-ci sont commis au
nom de combats politiques et idéologiques détournant et instrumentalisant leur foi,
leurs croyances mises à mal et utilisées en couverture médiatiquement vendeuse.
Une réflexion pour lutter contre
l’incompréhension d’un message consistant à persister puis riposter par des
armes tout aussi barbares. Dans une Nation qui vise dans sa Constitution, la Déclaration
des Droits de l’homme et a eu à cœur de faire voter un attirail de lois
convergeant vers l’affirmation de l’égalité de toute vie humaine, peu importe
le territoire qui l’a vue naître, ses croyances ou ses orientations ; comment
expliquer que la seule réponse à la destruction d’une partie de l’humanité
tombée sous les balles, soit la destruction d’une autre partie de l’humanité
tombant sous les bombes ?
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