mardi 3 mai 2016

Et si Nabilla avait raison...

©Copyright DR – Nabilla – TF1
Souvent, le monde semble se scinder en deux catégories :

Les Profonds, ceux qui s’interrogent sur le monde, réfléchissent, intellectualisent, s’intéressent à des sujets dits « culturels », « intellectuels », brillent et séduisent par leur éloquence, leur perspicacité et leur quasi réponse à tout.

Les Creux, ceux qui vivent (de leur point de vue) ou subissent la vie (du point de vue des premiers), ne se posent pas de questions, fuient les complications dites « intellectuelles », choisissent les plaisirs simples et rejettent les tortures cérébrales.

En réalité, nous sommes nombreux à nager entre ces deux eaux. C’est par exemple, ce qui fait qu’on peut s’émouvoir devant une collection capsule H&M et s’irriter dans le même temps des conditions de travail constatées dans les usines textiles du Bangladesh. Néanmoins, en dépit de cette évidence des eaux troubles, on ne peut s’empêcher de vouloir caser nos semblables dans l’une ou l’autre de ces catégories. Ainsi, la Creuse accro à Secret Story qui décide de lire Stendhal sera  vue comme celle qui cherche une couverture pour infiltrer le milieu des Profonds tandis que la Profonde qui scrute Nabilla intellectualise en prétextant une analyse des mœurs.

Les Creux et le Profonds semblent entretenir en secret une inavouable et pourtant inévitable relation d’attraction-répulsion et le cas de notre chère Nabilla en offre d’ailleurs une parfaite illustration. Au regard de l’opinion commune, Nabilla qui a atteint les sommets de la notoriété grâce à son « Allo, non mais allo quoi, t'es une fille t'as pas de shampoing […] » fait partie du monde des Creux. 

Appartenance qui, aux yeux de tous, a la particularité d’être assumée, événement suffisamment rare dans cette société pour que cela ouvre les portes de la célébrité. En effet, il est usuellement de bon ton de renier cette appartenance ou lorsqu’elle est avérée de faire profil bas. Je suis creuse mais j’ai la bienséance de ne pas le crier sur les toits ou de le présenter comme une tare, ce qui pourrait presque émouvoir les Profonds qui pensent alors « Ce n’est pas de sa faute…et puis elle est gentille ».

Tout le monde semble viser l’univers des Profonds, le graal, le côté solaire de la force. Nabilla en glorifiant sa dite appartenance, déstabilise, allant jusqu’à en faire son fonds de commerce. Et pourtant, les Profonds sans l’adopter, n’ont de cesse de lui tourner autour, lui offrant une exposition médiatique notable et une tribune open bar. 

Certes, on fait mine de la dénigrer, de faire place à la dérision, sous couvert de : « J’en parle mais c’est juste pour montrer à tous à quel point elle est vide » mais le fait est qu’elle est là et bien là et que les Profonds s’enlacent autour de ses longues jambes comme le chat en quête de caresses, presque subjugués. Le triomphe de la team Creux, façon la revanche d’une blonde ?…Pas vraiment car à y regarder de plus près l’attraction-répulsion se retrouve également dans l’autre camp. En poursuivant avec notre sujet d’études du moment, notre chère Nabilla, certes aidée de professionnels de la communication aux gros sabots, tout en criant partout son amour à la team Creux, ne peut s’empêcher de s’approprier les codes approuvés par la team Profonds. Ainsi, après un séjour carcéral qui remet les idées en place, exit le maquillage de berline venue d’Allemagne sans papiers, bye bye tenues affriolantes et constructions grammaticales hasardeuses, la  Belle donne dans le make-up light, la poitrine contenue et les efforts de phrasé, et tout ça pour plaire à qui ?...

De même, d’autres ne se privent pas de cumuler les signes extérieurs des Profonds pour ne véhiculer que du creux à la manière des philosophes de la misère qui dissimulent le vide spirituel derrière des circonvolutions pseudo-intellectuelles.

L’un attire et rejette l’autre et ne saurait pourtant vivre sans l’autre. Peut-être, parce qu’en créant cette dichotomie on renie tout simplement la nature de l’homme.
D’autant que ma perception des Profonds et des Creux n’est certainement pas la même que celle de mon voisin même si tous deux, nous continuons consciemment ou inconsciemment de classer dans une catégorie ou dans une autre.

Et si on assumait enfin en faisant cohabiter ces deux aspects à savoir le bonheur d’être Creux et le choix d’être Profond. Car si le monde des Profonds aide à se renouveler et donne l’impression d’exister, il faut reconnaître que le monde des Creux est reposant. Imaginez, vous êtes catalogué Creux. Finalement, personne ne sollicite votre avis, si ce n’est pour détendre l’atmosphère ou se changer les idées. Personne n’attend rien de vous et lorsque l’on voit en vous le problème et non pas la solution au problème, vous pouvez dès lors vous délecter d’un certain repos cérébral voire profiter de cette intimité cérébrale pour vaquer sans pression aux réflexions les plus profondes, que vous partagerez…peut-être. Et vous, ce soir vous la jouez Creux ou Profond ?


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