Si je vous dis « J’viens pas
d’la cité mais le beat est bon » et que vous faites appel à votre mémoire,
vous devriez entendre s’insinuer dans votre tête la chanson de rap champêtre
qui avait envahi internet, les ondes et le tube cathodique en 2007. Interprété par
Kamini, ce single mettait à l’honneur la commune de Marly-Gomont en Picardie en
dépeignant le quotidien d’un noir « isolé » dans un microcosme
campagnard plutôt hostile.
En 2016, Kamini décline ce succès musical en œuvre cinématographique
en apportant son idée originale et en co-scénarisant le film Bienvenue à
Marly-Gomont aka BAMG.
De prime abord et si vous décidez
de vous cantonner au premier degré, vous pourrez y voir, un dérivé un peu plus
social mais tout aussi attaché à la fibre comique de Bienvenue chez les Ch’tis.
En effet, tout comme le titre, le synopsis
pourrait présenter quelques similitudes : un individu accompagné de sa
famille dans le cas de BAMG, débarque dans une communauté aux antipodes de la vie
citadine mais surtout aux us et coutumes bien de chez elle, marqués au fer
rouge par des caractéristiques qui nagent en eau trouble entre clichés et
vérités.
Dans BAMG, Seyolo Zantoko, jeune diplômé
en médecine, extirpe femme et enfants de leur Zaïre qui apparaît comme chaud et joyeux pour les
enterrer vivants dans un village picard froid et peu accueillant. La vie de
Kamini Zantoko est alors romancée pour céder à des rouages comiques presque
attendus : le froid insupportable, les habitants et leur mode de vie d’un
autre temps, les accents improbables, les fulgurances de la famille du bled
dansante et chantante qui détonnent dans ce village perdu.
Des rouages comiques, un peu
convenus mais qui parviennent largement à vous tirer des sourires, comme cette
scène où Aïssa Maïga, qui joue la mère, arpente les rues du village en lançant
tout sourire à chaque passant des « vin diou », entendus plus tôt, en
guise de « bonjour ». Facile mais marrant.
Puis à y regarder de plus près,
la comparaison s’arrête là. D’abord parce Bienvenue
chez les Ch’tis m’avait plutôt laissée de marbre alors que BAMG a su me
décrocher plusieurs sourires.
Ensuite, parce que le film a plusieurs
cordes à son arc qui méritent d’être
relevées :
Le côté histoire vraie : hé oui, la
fiction, c’est bien mais le clin d’œil à la réalité me séduit toujours. J’imagine
que la réalité a été quelque peu « pimpée » pour répondre aux codes
cinématographiques, néanmoins, l’histoire s’inspire d’un vécu médiatisé par une
chanson et qui doit encore parler à de nombreuses personnes ayant vécu ou qui vivent
une situation similaire. Dans mon cas particulier, l’identification a
fonctionné et créé de fait de la connivence.
La bienveillance : BAMG aborde un sujet de
société toujours d’actualité, le racisme dans son expression la plus primaire
avec des mises en situation aux accents comiques tirés de leur aberration. Si la
violence des réactions fait rire par son ridicule, celui-ci n’évince pas pour
autant la réalité de cette violence. Ainsi, bien que le sujet abordé soit attaché
à une réalité propre à susciter de l’indignation, le film le traite en toute
bienveillance. Le personnage principal et les membres de sa famille, en dépit
du rejet longtemps sans appel des habitants de la commune, des insultes, de la
médisance, de l’ignorance évoluent sans aigreur comme pour se montrer plus
dignes que l’horreur.
La sensibilité et l’émotion : j’ai souri mais
j’ai aussi apprécié les pauses sensibles, plus délicates que dans certaines
comédies dans lesquelles la musique mièvre vous signale qu’il est l’heure de
lâcher sa petite larme.
Le message : A certains moments, j’ai pu
penser : N’est-ce pas un peu caricatural quand même ? Mais à bien y
réfléchir, ces situations existent encore, en particulier dans les contrées qui « vivent »
moins le multiculturalisme. Mais pourquoi était-ce si difficile à imaginer ?
Après tout, à Paris, capitale de la mixité, on en vient encore à rejeter des
candidatures sur photo ou patronyme à consonance extraterritoriale donc pourquoi
peiner à croire qu’une commune reculée de moins de 500 habitants puisse rejeter
en bloc un autre qui ne lui ressemble pas ? Cela ramène à une dure réalité
parfois niée par les plus privilégiés ou minimiser à tort.
Le jeu : enfin j’ai apprécié le jeu sobre
et efficace de Marc Zinga
qui incarne le père de Kamini et qui en s’appuyant sur un flegme tout en classe protège
cette comédie du potache.
Vous l’aurez compris, je valide
donc le Bienvenue à Marly-Gomont
porté par Kamini pour se détendre dans un premier temps, s’émouvoir et enfin
capitaliser en réfléchissant, plus tard...après avoir bien ri.
Bien d'accord avec toi j'ai beaucoup aimé ce film,
RépondreSupprimerbon week-end
Merci, bon week-end à toi également !
SupprimerMais t'es Qui toaaa ? Je viens juste de découvrir ce blog et je suis agréablement surprise, par toi subjugée même, je suis. J'aime ta plume, ta rhétorique. Je m'en vais te suivre maintenant et pour longtemps :-}
RépondreSupprimerMerci de ton très sympathique commentaire et bienvenue. Ravie que cette lecture ait été plaisante. A bientôt !
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