Crédits photo : David Shankbone — Travail personnel |
Vous ne pouvez pas être passés à côté du nouveau démon d’Hollywood. Après Cruella, le Joker, John Doe et Hannibal Lecter, place à Harvey Weinstein, producteur de cinéma américain à qui l’on doit notamment Pulp fiction. Depuis quelques jours, les langues se délient et la polémique enfle à grand train à mesure que les accusations d’agressions sexuelles, viols ou tentatives de viol pleuvent à l’encontre de l’ex-producteur tout-puissant. De nombreuses actrices du monde entier de Rose Mc Gowan aux Judith Godrèche ou Léa Seydoux nationales révèlent les horreurs qui auraient été infligées aux actrices par ce supposé mégalo prédateur sexuel.
Comme beaucoup d’hommes nourris du pouvoir conquis, bouffis par l’orgueil et la frustration née d’un constat de médiocrité, Harvey s’est pensé au-dessus des lois et de l’humanité en imaginant que ces êtres sur deux jambes gravitant autour de lui étaient, comme le reste dans ce monde où tous l’adulent(aient), prêts à consommer. Aujourd’hui, le supermarché a fermé ses portes et Harvey doit quitter ses cieux pour affronter la « dure réalité », l’heure est venue de payer.
Évidemment les faits relatés ne peuvent que susciter l’écœurement, l'indignation mais aussi le dépit car si révélateurs d’une ambiance sociale qui peine à évoluer en dépit de tous les slogans scandés et des bonnes intentions. Néanmoins, le scandale qui fait grand bruit a comme un goût de mascarade expiatoire. En effet, du jour au lendemain, Harvey se retrouve remercié par sa propre société, chassé de l’Académie des Oscars, jeté par sa femme, menacé de se voir retirer la légion d’honneur (comme quoi il faudrait vraiment penser à arrêter de la distribuer à tout va…), privé de dessert et j’ai même entendu dire que Monop’ envisageait de désactiver sa carte de fidélité. Loin de moi l’idée d’exprimer la moindre compassion à son égard. J’espère que ses avocats à 1 million de dollars n’empêcheront pas la justice de faire son travail et qu’il subira la lourde peine qu’il mérite.
Toutefois, il est également dur d’avaler l’hypocrisie ambiante et bien pensante du monde du cinéma comme de tout microcosme dans lequel le pouvoir fait loi au détriment des plus faibles ou des non avertis. Ce qui choque tout autant que les actes d’un criminel, c’est la cour de protecteurs dont il dispose et qui permet son règne. On peut en effet s’interroger sur la possibilité de perpétrer de tels actes sous l’unique influence de la menace. Menacer une actrice de la blacklister du monde du cinéma n’aurait évidemment pas suffi sans l’omerta entretenue par ceux qui savent, ceux qui voient, ceux qui couvrent, ceux qui empêchent de parler, ceux qui banalisent pour garder leur place, gravir les échelons ou parce qu’après tout ce n’est pas si grave. Ceux qui ne se sentent pas coupables car trop habitués à vivre dans une société dans laquelle une femme peut gagner moins à compétence égale, dans laquelle une femme fait d’abord parler d’elle pour se qu’elle porte avant de faire parler d’elle pour ce qu’elle dit ou fait, une société dans laquelle le naturel doit encore être contré à coups de loi sur la parité pour être chassé.
Cette affaire m’a d’ailleurs rappelé un épisode de la série française « Dix pour cent » dans lequel Juliette Binoche dans son propre rôle refuse les avances d’un magnat du CAC 40 investi dans le financement du cinéma et réputé pour faire ou défaire les carrières d’actrices. On est certes outrés par le comportement de cet impuissant tout-puissant mais surtout écœuré par tous les autres qui refusent d’être scandalisés. La scène la plus marquante étant celle durant laquelle l’une des organisatrices du festival je crois (pardonnez mon approximation sur sa fonction), une femme donc, fait « subtilement » comprendre à Juliette Binoche que si elle souhaite continuer à tourner (dans des films), il faut qu’elle arrête de faire sa prude…
Aussi, j’ai peine à croire qu’Harvey ait abusé ou tenté d’abuser de la moitié d’Hollywood sans que cela se sache et soit entretenu. Les récents témoignages, qui d’un coup deviennent nombreux, laissent d’ailleurs à penser que cela était de notoriété publique. Aussi, pourquoi ce qui offusque tout le monde aujourd’hui ne faisait sursauter personne hier ?
Ne serait-il pas un peu trop facile de crier au loup quand celui-ci est tenu en joue par le berger après s’être tapé allègrement toute la bergerie ? Quand la réponse sera posée peut-être servira t-elle également pour les cas similaires et tout aussi niés qui ne manquent pas dans les sphères politiques ou dans le monde du travail.
Très bon article, il faut vraiment qu’on s’attaque à toutes les personnes autour de lui qui ont facilités ses pratiques.
RépondreSupprimerMerci pour l'article. Oui en effet et dénoncer reste encore la plus efficace des attaques. Bonne soirée.
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