lundi 27 avril 2015

D'abord, ils ont tué mon père


Crédits Photo : KKISS
Je m’approprie chaque jour un peu plus l’expression « profiter des petits plaisirs de la vie ». Ainsi, les obligations du quotidien nous donnent suffisamment d’excuses pour nous éloigner des bonheurs aussi simples que de celui de lire. Une tasse de thé, une couette molletonnée, une lumière naturelle douce et un bon livre, un de ces bonheurs à la portée de beaucoup mais dont on se prive trop souvent. Ce mois-ci (oui, c’est le temps qu’il me faut maintenant pour lire un livre), j’ai tenté quelques fois ce scénario idéal sans réellement y parvenir, les pauses couette molletonnée étant souvent de courte durée et entrecoupées de sorties en métro, voyages en voiture, matins canapé et quelques autres formes de moment de tranquillité.

Ces derniers temps, j’ai dédié ces moments à la lecture du livre D’abord, ils ont tué mon père de Loung Ung.

Le pitch : Ce roman autobiographique conte l’enfance de Loung Ung, petite fille cambodgienne qui voit son quotidien de privilégiée au sein d’une famille aimante de Phnom Penh, brutalement bouleversé avec l’arrivée des Khmers Rouges et le régime dévastateur mis en place par Pol Pot. Elle nous emmène alors de familles d’accueil en camps de travail en lacérant chaque fois un peu plus le cœur pour les émotifs et éveillant la conscience des cérébraux voire les deux pour les plus chanceux.

Le goût laissé :

Ce roman autobiographique réussit la prouesse de nous plonger dans l’horreur des crimes du régime Khmers Rouges avec un regard bien plus nuancé qu’il n’y paraît. En effet, passée l’envie de se pendre en découvrant page après page le calvaire inhumain vécu par cette petite fille perdant pêle-mêle innocence, candeur, proches, dignité, vient le temps de l’analyse et du mi-figue mi-raisin.

Un appel à la réflexion servi par une écriture simple, sobre, dénuée de fioritures, sans figure de style, qui semble en accord avec l’humilité de l’auteure et surtout qui sert le propos car la star, c’est la réalité. Une réalité qui supplante l’écriture, une réalité au service de la mémoire historique qui pour ma part a été une vraie découverte.

Cette plongée dans l’histoire a eu pour moi la particularité de s’intéresser à une histoire peu connue, peu enseignée, peu pleurée mais surtout une histoire extrêmement récente, les Khmers Rouges ayant décimé plus d'un million de Cambodgiens de 1975 à 1979. Une histoire dictée par l'idéologie névrosée d'un homme ayant pour ambition d'éradiquer jusqu'à la dernière manifestation d'occidentalisation sacralisée par les villes et leurs "intellectuels" urbains. Une histoire d’à peine 35 ans qui a connu quelques soubresauts médiatiques lors des trop rares condamnations des dirigeants Khmers Rouges mais qui est loin d’être aussi populaire que certains autres massacres. Certes, les terres nationales ne « chérissent » pas autant les horreurs historiques que celles qui ont touché leurs terres mais au fil des pages, on ne peut que s’étonner du peu d’écho historique de ces évènements. Peut-être serait-il déplacé de s’étendre sur une situation que l’on a laissée perdurer.

Ce roman, c’est aussi l’exposé d’un cas de conscience, une dissection de la nature humaine, la même que celle illustrée dans le « Né en 17 à Leidenstadt » de Jean Jacques Goldman avec une population qui se laisse emprisonnée par la dictature de la peur, la peur d’être du mauvais côté, la peur de subir l’horreur que l’on doit imposer aux autres pour survivre, la peur de ne plus jamais pouvoir faire confiance, cette peur qui est le bras armé de tous les dictateurs qui ne sont rien sans elle.

Une plongée étonnamment touristique également car bien que les paysages cambodgiens ne soient qu’esquissés dans ce roman, l’envie de découvrir le pays naît surtout de sa charge historique avec peut-être un besoin presque féerique de constater de ses yeux qu’un pays peut vivre après « ça ».

Enfin, ce roman m’a insufflé en filigrane un rappel aux vraies valeurs. C’est certainement mon côté fleur bleue qui parle (si, si, je vous assure j’en ai un) mais je ne peux m’empêcher d’y lire un message connu de tous mais qu’il est bon de rappeler : profitons des petits plaisirs de la vie, ceux qui ne se saisissent pas, ne se collectionnent pas, ne se rangent pas dans des placards, les furtifs mais qu’une fois passés ne peuvent jamais être repris.

D’abord, Ils ont tué mon père
Loung Ung
Plon

2 commentaires:

  1. Salut, j'ai nominé ton blog pour le Liebster Awards, des questions t'attendent sur mon blog si le concept te plaît :)
    http://www.escaledoree.com/2015/05/liebster-awards.html

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    1. Hello Sandy, j'ai répondu à tes questions sur mon blog. Ayant déjà participé plusieurs fois, je n'ai pas nominé de nouvelles personnes mais c'est toujours un plaisir de répondre. Merci et bonne soirée ! Bises.

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